La Bergerie Céramiques

Encore une histoire sur Thiry...

L'objet en question...Qui est bien de Thiry!

Me promenant sur le site internet bien connu de vente aux enchères eBay, je suis tombé sur un superbe saladier de Thiry, de la dernière période (années 90-2000). Mais la description ne laissa pas d'exciter mon scepticisme ; je vous la donne telle que :
"Cette pièce n'a pas été acheté à vallauris, mais dans un village, où il y avais l'atelier/maison d'Albert Thiry (c'est ce que m'ont dit mes parents, qui m'ont offerts cet objet)" (sic)...




C'est là un de ces mystères auxquels on est en permanence confronté lorsqu'on veut raconter le passé, et il faudrait que les lecteurs, aussi bien de ce site que des livres spécialisés traitant le même sujet, se montrent indulgents, en tous cas, plus que certains qui prennent la mouche dès qu'une erreur réelle ou supposée est repérée.
Ce monsieur est de bonne foi, et ses parents aussi : or, les Thiry n'ont jamais produit ailleurs qu'à Vallauris. Comment concilier tout ceci?
C'est que, pendant des années, un gentil hurluberlu qui tenait boutique dans le merveilleux village de Cabris, au-dessus de Grasse, se faisait passer pour Thiry, étant simple revendeur des productions de ce céramiste, qu'il venait se procurer évidemment à Vallauris. C'était tout un théâtre : lorsqu'il commençait à vous entreprendre, vous en aviez pour une heure, d'une biographie fantastique et changeante d'un interlocuteur et d'un jour à l'autre. Tour à tour ancien capitaine au long cours et chasseur de crocodiles en Alaska, l'individu se présentait comme étant ce Thiry qui produisait lui-même ces céramiques. Il en cachait au fond de son entrepôt (on ne saurait parler de magasin), qu'il enfouissait sous la paille et la poussière, et faisait semblant de redécouvrir devant le chaland ébahi. Il en descendait de son galetas au moyen d'une corde, à la grande satisfaction des touristes qui contemplaient ce spectacle rare. Il ne manquait jamais d'exhiber un minuscule four électrique, qui n'était pas branché. A la question posée par un naïf : "Mais comment faites-vous pour cuire un plat si grand dans un si petit four?", le plaisantin ne se démontait pas : "Je cuis un côté, puis je le retourne, et je cuis l'autre". "Ha ha, évidemment, comme ça, bien sûr..."
A l'époque où je tenais la Bergerie, et où les pièces d'Albert Thiry (le vrai)  représentaient une part notable des ventes, il était très fréquent de m'entendre dire "M. Thiry n'est pas furieux que vous vendiez des copies de ses pièces?" Ou encore "Je connais bien M. Thiry, à Cabris. C'est drôle, il est plus cher que vous". A quoi je répondais :"Il n'a pas manqué de vous raconter sa vie pendant une heure. Considérez que vous avez payé pour l'objet, et pour le cabaret-spectacle"....
Bref, aujourd'hui que le vrai et le faux Thiry ont rejoint, l'un le paradis des artistes, l'autre, celui des saltimbanques, la légende continue de se propager. Est-ce grave, docteur?



28/11/2013
9 Poster un commentaire

Inscrivez-vous au blog

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 1095 autres membres